LE FENUGREC
Outre leur utilisation alimentaire en tant qu’épice (graines piquantes à l’odeur très forte), les graines du fenugrec (Trigonella foenum-graecum de la famille des Papilionacées- Légumineuses) ont toujours fait partie de la pharmacopée d’Europe du Sud et du Moyen-Orient. On utilise traditionnellement ces graines sous forme de poudre pour traiter le diabète, les migraines, les allergies, un taux élevé de cholestérol, la constipation.
Les actions hypoglycémiante, antidiabétique et hypocholestérolémiante des graines ayant été prouvées, l’industrie pharmaceutique les incorpore dans des préparations destinées à favoriser la perte de poids. Toutefois, il ne doit pas être administré à des femmes enceintes car il provoque des contractions utérines.
Action hypoglycémiante et antidiabétique
Le fenugrec a des propriétés antidiabétiques. Il agit sur le métabolisme des glucides en limitant leur assimilation et provoque la libération d’insuline. Une alimentation de trigonella foenum graecum sous forme soluble réduit l’élévation post prandiale de la concentration de glucose sanguin chez des rats présentant un diabète de type 2 [1].
De même, des rats diabétiques principalement alimentés avec du fenugrec recouvrent l’ensemble de leurs paramètres proches de la normale [2]. Le fenugrec préserve en particulier la structure histopathologique des tissus hépatiques et rénaux [18].
Enfin, chez l’homme, l’extrait de fenugrec, quand ingéré avec du dextrose, augmente la synthèse du glycogène dans le muscle après l’effort [16].
Molécules actives
Plusieurs molécules isolées à partir des graines possèdent une action biologique. Elles se situent dans la fraction dégraissée des graines riche en fibres, protéines et saponines.
La 4-hydroxyisoleucine
Les graines de fenugrec sont riches (0,6% du poids) en un acide aminé libre : la 4-hydroxyisoleucine (4-OH-Ile). Elle augmente la libération d’insuline induite par le glucose. In vitro, elle potentialise la sécrétion d’insuline de manière glucose dépendante. Chez des rats diabétiques et des animaux normaux, cet effet anti-diabétique est obtenu en partie par une stimulation directe des cellules β du pancréas. Elle réduit l’hyperglycémie et améliore la tolérance au glucose. Cette molécule pourrait donc traiter des patients atteints de diabète de type II, présentant une sécrétion défectueuse de l’insuline associée à une insulinorésistance. Des études cliniques sur des patients diabétiques ont confirmé ces effets. [3, 4]
La trigonelline
Cet autre composant des graines de fenugrec permet de ralentir l’absorption intestinale du glucose, ce qui apporte un effet hypoglycémiant. C’est un alcaloïde à l’action de phytohormone, la trigonelline ou acide N-méthylnicotinique. [5]
Le galactomannane
Les graines doivent être écrasées ou dégraissées pour obtenir le gel fibreux efficace situé dans l’endosperme. Un polysaccharide soluble dans l’eau, le galactomannane contenu dans ce gel est capable de réduire le taux de glucose sanguin après un repas. [6]
Le galactomannane additionné à l’eau forme une gomme visqueuse non absorbable, semblable à la gomme de guar, qui réduit la vitesse de remplissage de l’estomac en emprisonnant les glucides dans ce gel dans le système digestif. Ces hydrates de carbone ne seront donc pas transformés en graisse. Des graines débarrassées de cette gomme présentent beaucoup moins d’activité hypoglycémiante. [7]
Le cuivre
Les graines contiennent du cuivre qui a montré une activité antidiabétique. [8]
Suppression des symptômes cliniques du diabète
Les graines, même cuites ou grillées gardent encore leur propriété hypoglycémiante. Des symptômes du diabète tels que la polyurie, la polydipsie, la perte de poids sont supprimés grâce à ces graines. [9]
Une étude récente a montré, dans un modèle de rat diabétique, que le fenugrec présentait en outre un effet anti-cataracte [22].
Action hypocholestérolémiante
Une réduction significative du cholestérol total et des triglycérides a été observée après consommation de graines de fenugrec (fraction dégraissée) par des chiens diabétiques ou non. Cependant, le principal effet secondaire est la survenue de diarrhées et flatulences. [5]
Sur des modèles de rats diabétiques, suite à la consommation d’un extrait soluble de trigonella foenum graecum, les auteurs observent une diminution significative de la concentration de lipides, de triglycérides, de cholesterol ainsi que des LDL. La fraction soluble a un effet bénéfique sur la dyslipidémie et a tendance à diminuer l’agrégation plaquettaire chez les rats diabétiques. [1]
Ces résultats ont été confirmés chez l’humain. Le traitement au fenugrec réduit les fractions LDL, VLDL cholestérol et augmente légèrement la fraction HDL chez des rats et patients diabétiques de type II mais pas de type I. Les galactomannanes ont la capacité d’encapsuler les lipides et de former des micelles [9, 10].
Le fenugrec pourrait constituer un élément de prévention de l’athérosclérose et des maladies coronariennes.
Des saponines stéroïdales ont été mises en évidence dans ces graines (fraction dégraissée) : la diosgénone, la gitogénine et la tigogénine. Elles possèdent un effet anti-cholestérolémiant et une activité antifongique, de même que la gomme constituée de galactomannanes. Les saponines interagissent avec les sels biliaires dans le tube digestif [11]. Par contre la fraction lipidique des graines et la trigonelline ne montrent pas d’activité anti-cholestérolémiante [9].
Action sur le transit intestinal
Les graines de fenugrec sont composées de 20% de fibres et 32,4% de gomme. Elles ralentissent le transit gastrique [5, 9].
Utilisation du fenugrec dans les produits minceur
Le galactomannane représente 15% du poids de la graine de fenugrec. Isolé de la graine, il entre dans la composition d’épaississants alimentaires, émulsifiants ou améliorent la texture des produits allégés en matière grasse. Additionné à l’eau forme une gomme visqueuse non absorbable qui réduit la vitesse de remplissage de l’estomac et donc l’absorption du glucose. Le contrôle glycémique est amélioré [11].
Action sur la stimulation de l’appétit
En Afrique, les futures mariées consomment des graines de fenugrec pour être plus dodues. Elles donnent de l’appétit et favorisent la prise de poids des humains et du bétail.
Une étude sur des rats sains a montré que les extraits de graines favorisaient la consommation d’aliments et attisaient l’appétit. Les saponines contenues dans la graine sont responsables de cette stimulation de l’appétit [12].
Toutefois, utilisées en complément alimentaire, les graines ne provoquent pas de gain de poids chez des patients diabétiques ni les animaux testés [11].
Action anti-oxydante
Une étude chez le rat a montré qu’un complément de fenugrec provoque une augmentation du potentiel anti-oxydatif. Un examen histopathologique du foie et du cerveau révèle que le fenugrec offre une protection significative contre la toxicité induite par une alimentation constituée d’éthanol [13]. Les polyphénols contenus dans les graines de fenugrec pourraient être, en partie, responsables de cette propriété antioxydante. En effet, le co-traitement d’érythrocytes humains normaux ou diabétiques par le peroxyde d’hydrogène et un extrait de fenugrec riche en polyphénol entraine une inhibition dose-dépendante du stress oxydatif, en particulier de la peroxydation des lipides [17].
Le stress oxydatif jouent un rôle majeur dans les complications liées au diabète ; le fenugrec possède des propriétés anti-oxydantes encourageantes dans des traitements de sujets diabétiques [14].
Action immunitaire
Le fenugrec stimule les fonctions immunitaires de la souris [15].
Action anti-carcinogène
Un effet anti-néoplasique du fenugrec a été mis en évidence chez l’animal. En effet, une inhibition de la prolifération des cellules tumorales a été observée dans un modèle murin de carcinome [20]. Le potentiel anti-carcinogène de la diosgénine, principale saponine du fenugrec, a en outre été montrée dans le cancer du colon, à la fois dans un modèle de cancer du colon chez le rat et in vitro sur les cellules tumorales humaines [21].
Innocuité
La génotoxicité potentielle d’extrait de fenugrec contenant 40% de 4-hydroxyisoleucine a été évaluée par les techniques standards recommandées par la US Food and Drug Administration (FDA) : aucune toxicité n’a été mise en évidence [19].
Conclusion
Les graines de fenugrec peuvent être incorporées à l’alimentation (1 à 3g/repas) et agissent sur le métabolisme des glucides et des lipides. Le fenugrec et les fractions isolées de fenugrec agissent comme des agents hypoglycémiants et hypocholestérolémiant chez les animaux et les humains. Une composition uniquement de fibres et de saponines semblent être responsables de ses propriétés thérapeutiques.
Leur effet hypoglycémiant est dû à la fois aux effets locaux gastro-intestinaux des fibres et aux effets systémiques de molécules actives (la 4-hydroxyisoleucine en particulier) présentes dans les graines. Chez les diabétiques, elles améliorent la tolérance au glucose et le taux d’insuline. Elles peuvent donc constituer un traitement prometteur du diabète de type II grâce à ces propriétés hypoglycémiantes et anti-hyperglycémiantes.
Les effets hypocholestérolémiants des graines de fenugrec sont attribués aux saponines et aux fibres. Il existe aujourd’hui des compléments alimentaires à base de fenugrec pour favoriser la perte de poids, sans goût ni odeur, riches en fibres solubles. Attention toutefois à ôter les saponines responsables de l’augmentation de l’appétit, ce qui aurait des effets contraires à ceux souhaités. Toutes ces preuves scientifiques suggèrent que la consommation de graines de fenugrec puisse être bénéfique dans le traitement du diabète et la prévention des maladies cardiovasculaires.
Tableau récapitulatif des actions de chaque ingrédient des graines de fenugrec :
Composés des graines de fenugrec Caractéristiques Action hypoglycémiante Action hypocholestérolémiante
Galactomannanes Polysaccharides Réduisent vitesse d’absorption du glucose Encapsulent les lipides et forment des micelles
Trigonelline Alcaloïde
(phytohormone) Ralentit absorption intestinale du glucose
4-hydroxyisoleucine Acide aminé Augmente la libération de l’insuline
Isogénone, gitogénine et tigogénine Saponines stéroïdales Réduction des LDL, VLDL cholestérol et augmentation légère des HDL chez des rats et patients diabétiques de type II. Interaction avec les sels biliaires dans le tube digestif.
Références
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