La taurine
La taurine est dérivée d’un acide aminé soufré : la cystéine. Elle ne saurait être désignée comme un acide aminé, dans la mesure où elle ne possède pas de groupe fonctionnel acide. L’étymologie de la dénomination de cette molécule renvoie au taureau, animal symbolisant la force dans de nombreuses cultures. En fait, la substance a pour la première fois été isolée à partir de bile de taureau. Sur un plan métabolique, la biosynthèse de la taurine est réalisée dans le foie, selon des voies partagées avec la synthèse de la cystéine. Lorsque des enfants souffrent de déficiences enzymatiques rendant impossible la transformation du précurseur de la cystéine, alors ils risquent une carence de taurine. Chez de tels sujets, la taurine revêt donc le caractère d’un acide aminé essentiel.
Aujourd’hui, la taurine est un ingrédient de nombreuses boissons énergisantes et est consommée en association avec des stéroïdes anabolisants ou avec de la créatine. Les données sur les effets de prises de taurine à haute dose et à long terme manquent. Cette molécule est sans doute l’objet d’un certain nombre de fantasmes lorsqu’elle est consommée sous la forme de stimulants.
Propriétés et rôles physiologiques
La taurine se conjugue avec les acides biliaires (acide cholique et chénodésoxycholique). Cet ingrédient joue un rôle dans des voies biochimiques impliquées dans le fonctionnement du cerveau et du système nerveux, dans la vue et dans la fonction cardiaque. Il contribue encore à la fixation cellulaire du magnésium. D’une manière générale, la taurine est considérée comme un agent stabilisateur des membranes cellulaires. Elle possède des propriétés neuro-relaxantes qui ne sont pas sans rappeler les effets du GABA et se comporte, de plus, en agent de détoxification des métaux lourds.
Globalement la taurine est donc un agent stabilisateur membranaire, régulateur du calcium intracellulaire, détoxificateur et osmorégulateur. Les fonctions physiologiques de la taurine pourraient être pour une part médiées par son caractère antioxydant. En effet, la taurine se comporte comme une molécule piégeuse de radicaux libres. Surtout, cette molécule pourrait jouer un rôle essentiel dans la stabilisation du métabolisme oxydatif.
La taurine est encore considérée comme un complément alimentaire intéressant pour les mères allaitantes.
Données scientifiques récentes
Les effets de la taurine ont été étudiés dans de très nombreux contextes :
celui de l’utilisation du glucose, celui de la mesure de la performance physique, celui d’affections dégénératives, etc. C’est un ingrédient proche des acides aminés, mobilisable de manière ubiquitaire par l’organisme. Cependant, Hansen et al. ont récemment insisté sur une propriété majeure de la taurine. Cette molécule est antioxydante, et surtout cette action s’exercerait au siège même du métabolisme oxydatif, à savoir les mitochondries :
« en stabilisant l’environnement des mitochondries, la taurine prévient la libération de composés réactifs et agit donc, indirectement, en antioxydant ».
Cet élément doit être souligné dans la mesure où un courant de recherche actuel insiste sur l’importance du ciblage des agents antioxydants vers les mitochondries. Suzuki et al. ont montré que la taurine était un constituant des ARN de transfert mitochondriaux. L’effet régulateur du calcium intracellulaire exercé par la taurine s’explique au moins partiellement par des mécanismes qui font intervenir l’organite-clé de l’énergétique cellulaire.
Enfin, Zhang et al. ont pointé l’intérêt de la taurine dans le soulagement de la fatigue visuelle causée par une exposition prolongée aux écrans d’ordinateurs. Pour ce faire, ils ont conduit un essai randomisé sur une population de 25 élèves de collège de sexe masculin. La taurine semblerait être en mesure de réduire l’intensité de la fatigue visuelle occasionnée par des activités longues sur écran (de type jeu vidéo).
Bibliographie
Zeybek A, Saglam B, Cikler E, Cetinel S, Ercan F, Sener G. Taurine ameliorates stress-induced degeneration of the urinary bladder. Acta Histochem. 2007 Feb 5.
Suzuki T, Suzuki T, Wada T, Saigo K, Watanabe K. Taurine as a constituent of mitochondrial tRNAs: new insights into the functions of taurine and human mitochondrial diseases. EMBO J. 2002 Dec 2;21(23):6581-9.
Hansen SH, Andersen ML, Birkedal H, Cornett C, Wibrand F. The important role of taurine in oxidative metabolism. Adv Exp Med Biol. 2006;583:129-35.
Nobuyo Tsuboyama-Kasaoka, Chikako Shozawa, Kayo Sano, Yasutomi Kamei, Seiichi Kasaoka, Yu Hosokawa, and Osamu Ezaki. Taurine (2-Aminoethanesulfonic Acid) Deficiency Creates a Vicious Circle Promoting Obesity. Endocrinology 2006 147: 3276-3284; first published April 20 2006 as doi:10.1210/en.2005-1007
Zhang M, Bi LF, Ai YD, Yang LP, Wang HB, Liu ZY, Sekine M, Kagamimori S. Effects of taurine supplementation on VDT work induced visual stress. Amino Acids. 2004 Feb;26(1):59-63. Epub 2003 Aug 21.
Tadano T, Nakagawasai O, Niijima F, Tan-no K, Hanawa MA, Sakata Y, Sutoo D, Nemoto Y, Ida Y, Endo Y. Effect of nutritive and tonic crude drugs on physical fatigue-induced stress models in mice. Pharmacol Res. 2003 Mar;47(3):195-9.
Barthel T, Mechau D, Wehr T, Schnittker R, Liesen H, Weiss M. Readiness potential in different states of physical activation and after ingestion of taurine and/or caffeine containing drinks. Amino Acids.
2001;20(1):63-73.
Trachtman H, Futterweit S, Prenner J, Hanon S. Antioxidants reverse the antiproliferative effect of high glucose and advanced glycosylation end products in cultured rat mesangial cells. Biochem Biophys Res Commun. 1994 Feb 28;199(1):346-52.